LE COUCOU de Alain Fauré

Publié le par REGARDS

Il était une fois…

Dans un petit village, la veille de Noël, un homme très malheureux qui rentrait chez lui car la nuit allait bientôt arriver.
Il avait passé sa journée à chercher des bouts de bois pour pouvoir se chauffer un peu, il avait aussi cherché de quoi se nourrir, mais hélas, il n’avait trouvé qu’un quignon de pain gelé.
Le chemin du retour lui paraissait pénible car il savait qu’au bout il n’y avait rien d’autre qu’une maisonnette triste et froide où il allait passer une nuit de Noël avec la faim au ventre et le cœur en chagrin.
Tout à coup, son regard fut attiré par un drôle d’objet à moitié recouvert par la neige et qui gisait dans le fossé au bord de la route.
Il ramassa l’objet en le débarrassant de cette neige qui fait tant le bonheur des enfants mais qui pour le moment lui brûlait les doigts.
A cet instant, un éclair étrange brilla dans ses yeux, il tenait une pendule à coucou et cela lui rappelait l’époque où il était un horloger heureux.
Arrivé dans son logis il déposa la pendule sur sa table vide, alluma un reste de bougie, jeta les bouts de bois dans l’âtre afin que les flammes avides lui permettent de se réchauffer un peu.
Il caressa la pendule pour enlever les dernières traces de neige. Ensuite, il alla chercher dans un coin de la pièce, une petite caisse qui contenait ses outils d’horloger, ceux-ci n’avaient plus servi depuis que sa femme était morte lors du cambriolage de la bijouterie, qu’ils avaient achetée dans la grande ville. Sa désespérance avait été tellement immense qu’il avait fuit vers ce petit village où personne ne le connaissait ; laissant son chagrin l’envahir à tel point que la vie ne signifiait plus rien pour lui.
Alors qu’il dévissait le boîtier en bois, ses mains tremblaient, de froid ou d’émotion, nul ne le sait. Lorsque les divers engrenages apparurent, il sembla y avoir des petites étincelles dans ses yeux !
Patiemment, il démonta, nettoya, huila et remonta la pendule, la posa debout au milieu de la table, la regarda et lança le mécanisme. Aussitôt un tic-tac se fit entendre et un sourire s’esquissa sur son visage. Il laissa sa tête aller en avant sur ses bras croisés au bord de la table, vaincu par la faim et le froid, il s’endormit.
Le temps passa, arriva minuit ; le coucou jaillit de la pendule pour le 1er coup du 25 Décembre, mais il ne fit pas le « Cou-cou ! » habituel, au lieu de cela, en silence, il s’envola, passa par la cheminée et se retrouva dehors, prenant la direction de l’église où les habitants du village étaient réunis pour la Messe de Minuit.
L’oiseau de bois entra dans l’édifice religieux et se posa sur l’épaule du jeune curé sous les regards étonnés des paroissiens.
Les spectateurs de cette étrange scène eurent l’impression que l’oiseau parlait à l’oreille de l’abbé ce que confirmaient les diverses expressions qui animaient le visage de celui-ci.
Le prêtre posa délicatement l’oiseau sur un lutrin et commença son homélie, à leur tour les paroissiens prirent des mines diverses au fur et mesure que se déroulait le sermon…

Une sonorité bizarre fit sortir l’homme de son sommeil, la pendule marquait une heure moins dix, nous étions le jour de Noël ! La sonorité s’intensifiait, l’homme crût reconnaître le chant « Il est né le divin enfant », il secoua la tête croyant être victime d’un mirage auditif provoqué par la faim.
Au même instant on frappa à la porte, l’homme hésita, pensant toujours que cela n’était pas réel, en effet, qui pouvait bien venir chez lui à cette heure là, ce jour là ! Il se leva, se pinça pour vérifier qu’il était bien conscient et se dirigea vers la porte derrière laquelle le chant était maintenant parfaitement audible.
Il ouvrit la porte… Aussitôt, le Coucou entra, lui tourna autour 3 ou 4 fois et alla se glisser dans la pendule. L’homme ne bougea pas, il avait les yeux si grands ouverts qu’ils donnaient l’impression que ses orbites étaient trop petites pour les contenir !
Devant lui, dans la neige qui recouvrait le chemin menant à sa demeure, se tenaient les habitants du village, ils chantaient tous, et tous avaient un présent dans les mains : certains apportaient du bois, des vêtements, des couvertures bien chaudes, d’autres de la nourriture (de la dinde rôtie, des champignons en persillade, des patates sautées, de belles tranches de pain, des morceaux de bûche, des friandises : pralines et crottes en chocolat, etc.).
Tout le village défila devant lui pour aller déposer les présents, le bois près de la cheminée, les mets sur la table qui semblait bien petite tout à coup. Les enfants et les femmes lui firent la bise, les hommes lui offrirent une chaleureuse poignée de main, tous eurent une parole aimable, lui n’arrivait pas à prononcer un mot. Seules, les larmes qui comme des perles de glace descendaient en silence sur ses joues, permettaient de mesurer son bonheur.
Le dernier à sortir de la maisonnette fut un garçonnet d’une dizaine d’années, avant de franchir le seuil, il prit les deux mains de l’homme, sans un mot car il était muet, il déposa dans l’une un billet de 10 € et dans l’autre une montre en panne, l’homme sourit et murmura «J’ai compris.».

Depuis cette nuit là, il y a un nouvel horloger au village et dans la maison de l’horloger, il y a une pendule à coucou qui fait un drôle de tic-tac, on dirait plutôt un battement de cœur !!!

Certains diront que cette histoire n’est pas vraie, car les oiseaux en bois ne volent pas !
A ceux là, je répondrais que cette histoire a eu lieu une nuit de Noël et que tout le monde sait, depuis toujours, que les nuits de Noël sont des nuits magiques !!!

 

1er prix du concours littéraire Handichef

 

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G
c'est très beau et très profond ! Les cambrioleurs commettent des forfaits dont ils ne mesurent pas les conséquences, mais parfois ils ont faim eux aussi (ce qui ne les excuse pas !) un adorable conte de Noël où les villageois deviennent frères par l'entremise d'un oiseau de bois qui parle à un curé, qui lui-même parle à ses paroissiens... c'est vraiment un miracle ! bravo à l'auteur, Alain Fauré et joyeux Noël à lui et à tous ! germaine
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